Retour aux sources : Music on Hold

22.06.2021

On découvre souvent les artistes sur scène, sur album ou dans un clip. On peut aussi apprendre à les connaître autrement, en s’intéressant aux groupes et aux morceaux qui les inspirent ou les ont inspirés, et qui sont même parfois à la source de leur cheminement musical.

Avec un premier album sorti en février sur le label Born Bad (30 Minutes of… Music on Hold), le trio parisien Music on Hold élabore une pop synthétique, légère et piquante comme on agite une bouteille de soda. Emile Cartron-Eldin, le chanteur et leader, passe en revue quelques-unes des influences du groupe qui jouera pour la première fois à Rennes le 30 juin prochain au parc Jean Guy.

Ramones – Bonzo Goes To Bitburg (1986)

 

« C’est mon groupe préféré, une formation indépassable. Je les écoute depuis l’âge de 6 ans. C’est un cas d’école d’efficacité. Je ne connais pas de musique plus transparente. C’est à l’os. Il y a une pureté. J’ai appris la guitare en reprenant les Ramones. Comme je connais leur discographie par cœur, j’ai choisi ce premier single d’un album assez tardif, Animal Boy, leur neuvième, sorti en 1986. C’est d’ailleurs le seul bon morceau du disque. A la batterie c’est Richie Ramone et la caisse claire ne sonne pas du tout Ramones. C’est un groupe pétri de contradictions. Là, il signe un morceau politique assez direct contre Reagan alors qu’il n’était pas vraiment connu pour ses prises de position. »

Martin Rev – Secret Teardrops (1996)

 

« Nous aurions pu choisir tout l’album See Me Ridin’. Il y a une ambiance hyper onirique dans les productions de Martin Rev. Son approche est plus expérimentale en solo qu’avec Alan Vega au sein de Suicide. On y entend du bebop, du doo-wop, un phrasé un peu ternaire, qui fait penser à des comptines. Secret Teardrops en est le meilleur exemple. C’est très minimaliste, parfois il n’y a pas de section rythmique. C’est un beau pas de côté pour un musicien souvent réduit à son statut de pionnier du punk. Martin Rev pourrait faire uniquement des concerts de reprises de Suicide, au lieu de ça il offre de nouvelles compositions, ne se pastiche pas et va de l’avant. »

Christophe – Agitation (1980)

 

« C’est le morceau d’ouverture de l’album Pas vu, pas pris (1980). Christophe avait laissé son beau-frère, le chanteur Alain Kan, écrire les textes car ce dernier avait besoin d’argent. Pour un projet d’article que je devais rédiger sur le glam en France, comme une sorte de contrepoint au livre du critique musical Simon Reynolds, Le choc du glam (éditions Audimat), j’en étais arrivé à la conclusion que Christophe était l’un des chanteurs français les plus glams : les fringues, le jeu sur l’écho… Agitation est un titre très produit et en même temps, on sent bien que c’est le travail d’un seul homme. Je m’étais inscrit en novembre 2020 à la vente aux enchères chez Drouot de ses objets. J’ai failli acheter une de ses machines, un sampler SP-404 car j’étais persuadé que les cartes SD à l’intérieur n’avaient pas été effacées. J’ai abandonné quand le prix a atteint les 700 euros. »

Devo – Beautiful World (1981)

 

« C’est le groupe qui met tout le monde d’accord au sein de Music on Hold, alors qu’on a plutôt des goûts divergents. Ça s’explique par le rapport de Devo à la pop, à la production et aux machines. Devo est un groupe à la fois extrêmement ambitieux et laborieux dans son processus de création. Dès leurs débuts, ils avaient déjà tout en tête. Beautiful World est une belle ballade pop qui contient une ironie. Il y a une charge politique chez Devo, une double lecture. Si on envoie une musique naïve, il faut contrebalancer dans les textes. J’ai fait un master en sciences politiques en anglais sur les États-Unis, cela m’a inspiré pour le morceau Gary Manders des paroles sur le découpage électoral en Caroline du Nord qui favorise le vote républicain. Devo m’a appris à avoir une grande liberté dans les sujets. »

Jean-Luc Le Ténia – Tous les jours (2008)

 

« Écouter Jean-Luc Le Ténia (1975–2011), c’est rentrer chez quelqu’un sans frapper. Il faut se rendre sur le site Internet dédié à son travail (http://teniadiary.fr/) qui est très bien entretenu, même dix ans après son suicide. Je ne saurais pas expliquer pourquoi ça me plaît. On a tous un rapport vraiment personnel avec son corpus de chansons. Certains l’appellent le “Daniel Johnston français”. Mais il faut juste l’écouter, ne pas chercher à trop projeter de choses, sinon on fait fausse route. »

Ecoutez la playlist complète

Music on Hold sera en concert (précédé du groupe Emmanza), le 30 juin à Rennes au parc Jean Guy, dans le cadre de la programmation estivale Les Trans aux Parcs.