Retour aux sources : Moundrag

21.10.2022

Qui a dit qu’il fallait une guitare pour faire du rock ? Les frangins Camille et Colin Goellaën Duvivier sont aux manettes de Moundrag (vu aux Trans Musicales 2019), un duo batterie-claviers originaire de Paimpol dont le nom est tout simplement l’anagramme de « organ » (orgue) et « drum » (batterie). À l’occasion de la sortie de leur nouvel album, Hic Sunt Moundrages (le 21 octobre chez Dionysiac Records/Modulor), et de leur concert à l’Ubu le 3 novembre pour la release party du disque, les deux frères nous emmènent en voyage au début des années 1970, aux racines de leur son heavy-psyché.

Tarkus (1971) de Emerson, Lake & Palmer

 

Camille et Colin : « On a entendu le morceau Tarkus pour la première fois sur un best of de Emerson, Lake & Palmer qu’on avait acheté en 2012 dans une brocante. On commençait à faire de la musique et quelqu’un nous avait conseillé ce groupe en pensant qu’il nous plairait. A la première écoute, on a trouvé ça imbuvable. C’était notre première approche du rock progressif. Ça a été un choc. Notre oreille n’était pas formée. Tarkus est un élément fondateur de Moundrag, un duo que l’on a créé en 2019 avec la volonté d’explorer différentes facettes du rock progressif. Ce morceau, c’est la grosse classe. Il y a plusieurs mouvements comme dans une composition classique ou un opéra. Le trio prend le temps de développer un thème sur 20 minutes. Ça joue, c’est très musical. On voyage avec cette musique comme à travers un tableau. Emerson, Lake & Palmer est une grande référence. »

Made in Japan (1972) de Deep Purple

 

Colin : « A partir de l’âge de 13 ans, on a décidé de dédier notre vie au rock. Ainsi, on a monté notre premier groupe : Smooth Motion. A chaque Noël, notre oncle irlandais nous offrait un CD. On a reçu en cadeau une compilation de blues, un album de Led Zeppelin… Une année, il nous a rapporté Made in Japan, de Deep Purple. Moi, en tant que batteur, je voulais jouer comme Ian Paice. »
Camille : « C’est grâce à ce disque que je me suis mis à l’orgue Hammond. On pouvait faire du rock avec un clavier ! J’ai passé au moins dix ans à obtenir LE son d’orgue de Jon Lord pour que ça sonne comme une guitare. À trouver le bon ampli, le câblage, les pédales d’effets… Deep Purple est le premier groupe à mixer l’orgue au même niveau que la gratte. »
Colin : « Made in Japan a été notre codex. Il nous a montré la voie à suivre. »

Death Walks Behind You (1970) d’Atomic Rooster

 

Colin : « De nombreux albums des années 1970–1971 sont devenus mythiques. C’est une époque charnière. Le matériel de sonorisation évolue. Les musiciens, qui ont grandi avec les Beatles, commencent à développer un son heavy en poussant les amplis à fond. Nous sommes très attachés à cette période. »
Camille : « Il faut parler de la pochette de cet album d’Atomic Rooster. Elle est hyper cryptique. Elle fait un peu peur. Comme le visuel, la musique est effrayante au départ mais on apprend à l’apprécier avec le temps. On a découvert le groupe vers l’âge de 13 ans, mais on en est vraiment devenu fan depuis 3 ans avec les débuts de Moundrag. Death Walks Behind You fait partie de nos disques de chevet. Quand on essaye de trouver une direction artistique, des compositions, on revient vers Atomic Rooster pour savoir si on ne s’éloigne pas de nos influences de base. C’est une des premières formations à avoir été qualifiée de sataniste. Alors que ce n’est pas du tout le cas. Ils font juste référence parfois au démon. »
Colin : « Dans les chansons de notre nouvel album, Hic Sunt Moundrages, on évoque nous aussi le bien, le mal, Dieu et le diable. »

Salisbury (1971) de Uriah Heep

 

Camille : « Au sein de Moundrag, nous partageons le chant et l’écriture des textes. Parfois on écrit pour soi, parfois pour l’autre. Uriah Heep nous inspire énormément pour les parties vocales communes. Ce groupe anglais possède lui aussi deux vocalistes : le frontman et l’organiste, qui atteignent un très haut niveau d’harmonie vocale. Comme Atomic Rooster, Uriah Heep évoque dans ses morceaux des démons, des sorciers. Ils explorent un registre épique, dans la veine Donjons & Dragons [Jeu de rôles fantastique], avec de grandes descriptions et un vocabulaire féérique. On trouve ça plutôt intéressant. »
Colin : « Nous sommes très attachés aux légendes bretonnes. On retrouve ces thèmes dans nos titres. Le cycle arthurien nous inspire. Sur l’album, une des chansons parle ainsi d’un chevalier. »

Komodor

 

Colin : « À Paimpol, on n’avait aucun copain avec les mêmes références musicales que nous : Deep Purple, Emerson, Lake & Palmer, Atomic Rooster… On se demandait pourquoi personne n’écoutait ça à par nous. Le jour où on a rencontré les Bretons de Komodor, avec leurs pantalons pattes d’eph, on s’est dit : “Enfin des gens avec qui on va pouvoir discuter.” Ils sont devenus des amis. On a même monté un groupe ensemble : Komodrag & The Mounodor (programmé aux Trans en 2021). »
Camille : « Le rock de Komodor est très américain. On entend chez eux le MC5, Ram Jam, Grand Funk Railroad… On kiffe ces références, même si on est plutôt rock british. Les Komodor nous ont invités chez eux, à Douarnenez. On a joué ensemble dans un bar, le Banana Boat. C’était la première soirée Komodor/Moundrag. Au bout de 10 minutes, on avait l’impression qu’on se connaissait depuis 10 ans. »

Moundrag est en concert à l’Ubu, le jeudi 3 novembre à partir de 20h dans le cadre de la release party de leur album, accompagné du groupe Komodor.