Retour aux sources : Freak It Out

24.11.2021

On découvre souvent les artistes sur scène, sur album ou dans un clip. On peut aussi apprendre à les connaître autrement, en s’intéressant aux groupes et aux morceaux qui les inspirent ou les ont inspirés, et qui sont même parfois à la source de leur cheminement musical.

Le délirant groupe Freak It Out prouve que le tout est plus que la somme de ses parties. Puisant aussi bien dans le rap ou le rock progressif que dans le math rock, Freak It Out est une joyeuse démocratie musicale où tous les courants peuvent s’exprimer. La preuve ci-dessous : chaque membre a choisi un artiste qui l’a influencé et a laissé une empreinte sur la musique du quintet rennais.

L’album Fragile (1971) de Yes


Pierre Léna
(basse) : « J’ai d’abord écouté du metal avant de me diriger vers le rock des années 1970 et le rock progressif de Yes, King Crimson… Le format des chansons de Yes est une référence. Avec toutes ses parties très différentes sur le plan rythmique qui s’enchaînent, on peut considérer le groupe comme un pionnier du math rock. Le jeu de basse de Chris Squire m’a énormément influencé. Je pense notamment au morceau Long Distance Runaround. L’intro à la guitare est suivie d’une partie de basse. Les deux n’ont rien à voir mais elles se complètent parfaitement. J’aime quand les deux instruments s’imbriquent sans qu’ils se suivent note à note. »

L’album California (1999) de Mr. Bungle


Maxime Mengelle
(guitare, chant) : « C’est un album riche qui ne se laisse pas facilement définir. C’est un ovni assumé et gourmand, qui n’hésite pas à aller piocher l’inspiration partout où elle se niche (rock, funk, pop, free jazz…). Ça fait du bien de découvrir qu’on peut visiter autant d’ambiances différentes, avec une recherche de son et d’arrangements aussi pointue. La cohérence et l’exigence qui se dégagent de ce disque me touchent particulièrement. L’avant-garde est au service d’émotions claires. Elle n’est pas purement intellectuelle. Il y a un côté grotesque, clownesque, qui permet au groupe d’oser très fort tout en restant vulnérable. »

L’album Demon Days (2005) de Gorillaz


Fabien Joffard
(synthés, percussions, chant) : « Cet album continue aujourd’hui de me tenir aux tripes. Damon Albarn, l’homme aux manettes de Gorillaz, est une énorme inspiration. Le rap est très présent dans Freak It Out. Nous sommes quatre chanteurs/rappeurs avec chacun notre style. Gorillaz laisse le champ libre à la créativité de chacune des personnes qui collaborent au projet. On retrouve à notre échelle cet esprit collaboratif. Dans Freak It Out, chacun apporte son univers. Nous avons aussi en commun avec Gorillaz la volonté d’avoir la palette sonore la plus large possible. Au début, cela passait par de la débrouille. Avec Freak It Out, on aspire à une grande ambition dans les arrangements tout en gardant notre côté indé. »

L’album Blood Visions (2006) de Jay Reatard


Thibault Talmont
(synthés, chant) : « J’ai découvert Jay Reatard au collège. J’ai toujours aimé le punk garage. La pochette, qui représente un mec nu couvert de sang, ne laisse pas indifférent. Jay Reatard raconte ses ‘‘visions sanglantes’’. Il voit la vie de manière hyper violente, avec un humour très noir. Il parle d’isolement, de mort, de suicide. Ses paroles ont quelque chose de monstrueux et de très humain. Son chant, gueulé mais aussi tout en sensibilité à la Robert Smith de The Cure, m’a beaucoup inspiré. Ce qui est intéressant chez Jay Reatard, mort à 29 ans, c’est l’éventail de sa production. Il a sorti une vingtaine d’albums metal, noise, punk, mais on reconnaît toujours sa personnalité. Il n’a jamais cherché à rassembler à quelqu’un d’autre. J’aime sa spontanéité, son côté DIY, ses aspérités. »

The Grand Wazoo (1972) de Frank Zappa avec le groupe The Mothers

 

Lancelot Rio (batterie, chant) : « Frank Zappa est ma porte d’entrée dans le rock prog. Un rock progressif un peu fou, grandiose et ridicule, franchement expérimental. Un sacré bazar où l’on peut se perdre. D’ailleurs, ado, j’étais paumé dans sa discographie. Mais certains morceaux, comme The Grand Wazoo, ont servi de points d’accroche. Zappa s’est intéressé à la musique orchestrale, à la musique concrète. Il a construit des albums hybrides, un peu inclassables comme Lumpy Gravy, un insaisissable ovni rempli de trésors. Ce sont des tableaux, des fresques sonores. Les fluctuations d’énergies, les bascules entre sérieux et burlesque forment un terrain propice aux histoires. Ce jeu avec les contrastes et cette façon de construire une narration m’ont beaucoup influencé. »

Freak It Out est en concert gratuit aux Trans Musicales le vendredi 3 décembre à L ’Étage.

Freak It Out est un groupe accompagné par Les Trans.